LE CHIEN ÉDUQUÉ “PAR LE COU” : colliers étrangleurs, à spray, électriques…

Les colliers coercitifs sont encore trop utilisés de nos jours. Certains humains s’aident de ces outils pour une grande partie de l’éducation de leurs compagnons, comme si le chien ne pouvait comprendre et apprendre qu’en subissant des douleurs au niveau du cou :

Il ne veut pas s'asseoir ? On saccade le collier.

Il tire en laisse ? On lui met un collier étrangleur.

Il fait des bonds pour aller voir ses congénères lorsqu'il est attaché ? On le retient avec un collier à piques (torcatus).

Il aboie quand il est seul ? On lui inflige un spray d'air via un collier anti-aboiement qui se déclenche automatiquement à chaque vocalise.

Il ne revient pas au rappel ? On lui met un collier électrique télécommandé qu’on déclenche pour le faire revenir.


Ces outils sont des solutions de facilité. Malheureusement, nous pouvons rapidement constater les effets secondaires de ces méthodes :

1) Santé

Le vétérinaire Peter Dobias a observé que les saccades répétées sur le collier ainsi que les colliers étrangleurs déclenchent de nombreux problèmes de santé, parmi lesquels : des troubles digestifs, des dysfonctionnements de la thyroïde, des problèmes de peau, des allergies, des boiteries, des problèmes pulmonaires, cardiaques, aux yeux, aux oreilles, un plus haut taux de cancer...

C’est un fait peu étonnant lorsqu’on sait que, sous le collier, il y a le cou et les vertèbres cervicales : dans lesquels il y a entre autres la moelle épinière (qui est la partie du système nerveux central, elle transmet les informations entre le cerveau et le reste du corps), de nombreux nerfs reliés aux organes internes (dont le cœur), la thyroïde, l’œsophage, la trachée et le larynx.

Imaginez l’impact de chaque saccade, de chaque étranglement (même si ça dure un quart de seconde)... Le cou est l’une des parties que l’on devrait absolument préserver chez le chien, étant donné l’importance de tout ce qui s’y trouve.


Les chiens éduqués à l’aide de saccades régulières sur le collier plat (ou d’un collier étrangleur) souffrent souvent de tensions et de douleurs au niveau du cou. Les ostéopathes canins peuvent constater cela et y remédier par des manipulations.

Si votre chien a un collier (même plat) et qu’il tire en laisse continuellement, il risque également d’en subir les conséquences. Apprenez-lui à marcher poliment à l’aide d’un harnais.


Concernant les colliers électriques (anti-aboiement, télécommandés ou anti-fugue), ils peuvent provoquer des brûlures et des lésions.

De surcroît, lorsque le chien reçoit une décharge, ses muscles respiratoires se tétanisent, son rythme cardiaque augmente et les fibres musculaires du cœur se contractent rapidement et de façon désordonnée.


2) Comportement : perte de confiance en son environnement, mauvaises associations...

Le chien ne peut pas échapper à la douleur ; l’environnement devient pour lui quelque chose de stressant et d’instable.


Le chien apprend par association : donnez une friandise à votre chien à chaque fois qu’il voit un enfant, il va adorer en croiser. Infligez-lui une décharge électrique à chaque fois qu’il voit un enfant, et il ne les supportera plus.

Prenons l’exemple d’un chien qui est en promenade avec sa famille ; il a trouvé une délicieuse odeur et il suit sa piste. Il a la truffe au sol, il avance en trottinant. Il est tellement dans sa bulle qu’il n’entend pas les appels de son humain. Le chien continue à suivre sa piste, qui s’arrête au pied d’un arbre. Au moment précis où il approche sa truffe de l’arbre pour analyser l’odeur, il se prend une décharge électrique. Bien sûr, il va reculer, cela le fait sortir de sa bulle. Que se passe-t-il dans sa tête ? Il peut associer la douleur à cette odeur ; il peut associer la douleur à cet arbre, ou même aux arbres en général. Il ne sait pas que c’est la télécommande reliée à son collier qui lui a déclenché cela. Cette situation peut se reproduire : quand le chien s’approche d’une roche, d’un buisson, des fleurs, d’un poteau, d’un banc, d’une poubelle, d’un grillage, d’une personne, d’un autre chien, d’un enfant, etc. Et l’environnement peut devenir quelque chose de dangereux à ses yeux, tant par les objets qu’il contient que par les odeurs, les bruits et autres stimuli.


C’est la même chose avec les clôtures anti-fugue : le chien s’approche de la barrière pour observer le voisin/un chien qui passe/une voiture… et il se prend une décharge, qu’il peut associer au stimulus qu’il voulait approcher ! La crainte peut ensuite mener à des réactions agressives : aboiements, grognements, pincements, morsures...

Voilà comment le collier électrique crée des problèmes de comportement !


Prenons maintenant l’exemple d’un jeune chien qui adore rencontrer des congénères.

En laisse, on ne lui a pas appris quel comportement avoir lorsqu’il croise des congénères. Alors il bondit en remuant la queue, il tire de toutes ses forces, et tente par tous les moyens de s’approcher des autres chiens. Ce comportement lui a déjà apporté satisfaction par le passé ; en effet, il a souvent pu avancer vers ses congénères et même jouer avec. Mais maintenant qu’il a 10 mois, il commence à avoir beaucoup de puissance et les croisements de chiens sont très désagréables pour la personne qui le tient en laisse.

Pour régler ce comportement dérangeant, sa famille choisit de lui mettre des saccades sur son collier (plat) à chaque fois qu’il y a une tension sur la laisse. Il faut savoir que ce chien ne tire que lorsqu’il voit des congénères ; en dehors de cela, il marche tranquillement.

Donc, à chaque fois qu’il voit un autre chien, il ressent une douleur dans son cou à cause de la saccade. Il est tellement concentré sur l’autre chien qu’il ne peut pas l’associer à son comportement exubérant. Il va commencer à associer les autres chiens à quelque chose de désagréable et même de douloureux. Ce chien qui adorait voir des congénères va commencer à les redouter. Il pourra chercher à les fuir en faisant demi-tour et en refusant d’avancer dans leur direction, ou au contraire à les éloigner par des aboiements. Dans le pire des cas il ne dira plus rien, ne cherchera plus le contact avec ses congénères et aura perdu sa joie de vivre.

On obtiendra le même résultat, voire même pire, avec un collier (semi-)étrangleur ou torcatus.


3) Stress, anxiété

Lorsque les décharges, saccades et jets d’air sont suffisamment puissants pour arrêter un comportement, le chien libère des hormones de stress. Ces dernières ne se dissipent pas instantanément une fois la situation stressante passée. En effet, elles circulent dans le sang pendant une durée variable qui peut aller de quelques heures à plusieurs jours.

Lorsqu’il y a un trop-plein de stress et d’anxiété, le corps n’arrive plus à rétablir l’équilibre et déclenche des maladies psychosomatiques, tout comme chez l’humain et les autres espèces.


Prenons le cas d’un chien qui aboie lorsqu’il est seul à la maison. Il est anxieux à chaque fois que ses humains s’en vont, et il aboie pour tenter de les rappeler vers lui. Sa famille lui met un collier anti-aboiement qui envoie un jet de citronnelle à chaque vocalise.

Si cet outil est suffisamment coercitif pour stopper les aboiements de ce chien, il va rapidement se retrouver dans une détresse très intense. Il sera comme muet, il n’aura plus aucun moyen d’appeler ses humains. Il peut alors développer des comportements alternatifs : à la place d’aboyer pour attirer ses humains, il va par exemple tenter de les rejoindre en grattant à la porte, en détruisant le sol, en faisant des trous dans les murs… Il pourra développer des comportements somesthésiques et des stéréotypies (se lécher/mordiller les pattes jusqu’à se blesser, tourner autour de sa queue, faire les cents pas…). Il pourra rester prostré dans un coin, se retrouvant dans un état de détresse acquise.

A cause de cet outil, son niveau de stress va considérablement augmenter, ce qui ne peut que renforcer le problème. Il faut toujours chercher à traiter en priorité la cause (dans ce cas : l’anxiété) et non la conséquence (les aboiements).

De plus, le collier à jet de citronnelle est certainement l’un des pires outils coercitifs. En effet, cette odeur est insupportable pour l’odorat très développé de nos compagnons canins. Il suffit d’un seul jet pour que l’odeur reste sur leurs poils pendant des heures. Imaginez qu’on vous mette sous le nez une odeur immonde - disons un mélange de vomi et de diarrhée – et qu’elle reste dans vos narines pendant plusieurs longues heures !


4) Brise la relation entre le chien et l'humain

Le chien ne devrait pas recevoir de douleur, et encore moins en présence de ses humains.

Les relations entre un chien et un humain devraient toujours être basées sur la confiance, la complicité et le respect mutuel.

Si votre chien vous écoute car vous venez de lui faire mal, il ne va pas le faire en remuant la queue avec des étoiles plein les yeux. Il aura probablement peur, il aura une posture basse, et cela risque fortement d’abîmer votre relation.

Il ne prendra pas de plaisir à vous écouter, il le fera simplement pour s’éviter des conséquences désagréables et douloureuses. Vous passerez alors à côté d’une belle relation humain/chien… Votre chien doit vous faire confiance en toutes circonstances, il ne devrait jamais avoir peur de vos gestes et vos réactions !


5) Problèmes de contact

Le chien peut développer des problèmes de contact au niveau du cou. En effet, s’il a l’habitude de recevoir des douleurs à cet endroit, le toucher peut être angoissant pour lui, ou même douloureux s’il y a des tensions au niveau du cou.

Cela peut être problématique dans la vie de tous les jours. Particulièrement si le vétérinaire doit manipuler le cou de votre chien ou lui faire une piqûre (ce qui n’est déjà pas très agréable à la base !). Ou bien si vous avez besoin de retenir votre chien par le collier pour lui éviter un danger…


6) Agressivité

Lorsqu’un chien a peur et/ou se sent en danger, il a trois solutions :

- Fuir

- Se figer / se paralyser

- Faire fuir / se défendre

Le chien ne peut pas fuir les saccades ou les décharges électriques au moment où elles sont infligées. Il lui reste donc la solution de se figer, ou de se défendre. Ces méthodes augmentent considérablement le risque de morsure.


Dans le cas des colliers anti-aboiement, on apprend au chien qu’aboyer est tellement douloureux que ce moyen de communication devrait disparaître définitivement de son langage. Suite à cela, ne comptez pas sur votre chien pour vous prévenir si quelqu’un s’introduit dans votre maison.

De plus, s’il a peur de quelqu’un ou s’il a mal quand vous le touchez, il préviendra d’une autre façon : grogner (si par chance le collier anti-aboiement n’a pas supprimé les grognements !), pincer, mordre…


7) Ethique

Les utilisateurs des colliers coercitifs proclament parfois : « ça n’a pas tué mon chien », mais nous pouvons avoir d’autres ambitions que de ‘juste’ garder nos chiens en vie, telles que les rendre épanouis, respecter leurs besoins et leur nature de chien, leur offrir une vie paisible…


Imaginez-vous une seule seconde faire subir cela à des enfants avec comme objectif de vouloir les éduquer.

- Tu ne veux pas manger tes épinards ? Tiens, une décharge électrique.

- Tu as des mauvaises notes ? Un pschitt d’odeur immonde dans le nez.

- Tu ne veux pas dormir ? Des saccades dans le cou.

- Tu fais des cauchemars, tu pleures et tu m’appelles la nuit ? Un collier qui envoie automatiquement des décharges à chaque vocalise (mais comme on n’est pas des monstres, le collier a une fonction qui envoie un « bip » sonore pour prévenir que la décharge va arriver si l’individu continue de pleurer/parler...).

Alors en effet, ce serait efficace. Vous auriez un parfait petit robot, pas épanoui, très stressé mais obéissant. Néanmoins, si vous utilisiez ces outils sur un enfant, vous auriez rapidement des poursuites pour maltraitance !

La vente et l’usage des colliers coercitifs sont déjà interdits dans plusieurs pays, tels que la Suisse, le Danemark, l’Australie, l’Autriche, la Slovénie… A quand le tour de la France ?


Conclusion

On ne peut pas dire que les colliers coercitifs ne marchent pas. Parfois oui, le chien peut l’associer au comportement souhaité… si on est extrêmement précis et si on a de la chance !

Mais, vu les risques et les effets secondaires qu’ils peuvent provoquer, ils ne devraient jamais être utilisés ; pas par des particuliers, et encore moins par des professionnels qui sont censés avoir suffisamment de connaissances pour (ré)éduquer un chien sans avoir besoin de le torturer… Il existe tant d’autres techniques, positives et bien plus fiables pour apprendre les bons comportements à nos chiens !